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Les études mènent-elles à l’ascension sociale ?

Posted by joelgombin sur 3 septembre 2008

Passe ton bac d’abord : c’est le leitmotiv que nos parents nous ont répété – nous, la génération née dans les années 1980. Dans un contexte de chômage de masse et de crise économique, nos géniteurs – mais aussi nos enseignants, nos grands-parents et nos nounous – n’ont eu de cesse de nous inciter à faire autant d’études que possible, afin d’avoir « un bon emploi ». Mais aujourd’hui, ceux d’entre mes camarades d’écoles qui en sont au même point que moi (bac + 8 ) se demandent parfois si faire les études les plus longues possibles était vraiment la bonne stratégie…

Quelle est la relation entre niveau d’étude et mobilité sociale, telle est en tout cas la question à laquelle tentent de répondre deux études récentes publiées par l’INSEE. Le premier article, signé par Valérie Albouy et Chloé Tavan, conclut à une démocratisation réelle de l’accès à l’enseignement supérieur en France à partir des années 1980, et ce à tous les niveaux. Pour autant, d’après cette étude, cette démocratisation reste limitée (et inférieure à celle du bac) ; et – où va se nicher la distinction… – la « polarisation sociale » des filières (c’est-à-dire le fait que certaines filières, comme droit ou médecine, sont investies de manière préférentielle par certains groupes sociaux, en l’occurence les plus favorisés culturellement et économiquement) est restée stable pour les hommes, mais s’est accentuée pour les femmes. Schématiquement, autrefois les filles (de toutes origines sociales) accédaient à l’enseignement supérieur plutôt par les filières les moins prestigieuses (technicien supérieur, écoles normales ou de santé), tandis que lorsque l’université s’est démocratisée, les filles des milieux les plus privilégiés ont davantage investi les filières les plus valorisées. 

Le second article, de Camille Peugny, examine quant à lui le rapport entre études et ascension sociale pour la génération née dans les années 1960 – les enfants des baby-boomers. Cette étude part d’un paradoxe : alors qu’auparavant, l’élevation du niveau d’études s’accompagnait d’une mobilité sociale ascensionnelle accrue, la génération née entre 1964 et 1968 connaît une moindre ascension sociale alors même qu’elle est globalement très diplômée (c’est la génération qui accède à l’enseignement supérieur au milieu des années 1980). Pour l’auteur, cette situation s’explique non seulement par la crise économique, mais encore par le fait que le lien entre diplôme et position sociale s’est amenuisé au fil du temps. En d’autres termes, pour les générations nées dans les années 1960, posséder un « bon » niveau de diplôme (par rapport à sa génération) est moins une garantie d’ascension sociale que pour les générations précédentes. Dans le même temps, on constate que l’impact des carcatéristiques sociales des parents pèse de plus en plus sur le devenir social des individus. Et pour attanger tout cela, l’impact de ces évolutions est plus fort pour les filles que pour les garçons…  Les générations nées à partir des années 1960 feraient donc l’objet d’un déclassement important, c’est-à-dire d’un décalage croissant entre le niveau scolaire atteint – et donc les espérances subjectives, fondées sur un état ancien du marché du travail – et la position sociale occupée.

Les historiens et sociologues savent que le développement d’un groupe d’intellectuels auxquels leur société n’offre pas de débouchés mène souvent à leur radicalisation politique. Le NPA de Besancenot fera-t-il son lit des jeunes surdiplômés chômeurs ?

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